« Bio-Where? » est née de constats mais aussi de beaucoup de belles rencontres et de lectures. Aussi il nous paraît essentiel de partager avec vous cette bibliographie qui a mis nos pas sur plus de conscience, nous espérons qu’il en sera de même de votre côté…
La personne qui nous a le plus inspiré depuis le début de cette aventure est Jocelyne Porcher, Sociologue – Directrice de recherche à l’INRA – UMR innovation.
A la lecture d’un article dans Le Monde Planète daté d’août 2015, et qui reprenait en détail les abus que l’industrie porcine fait subir aux animaux, nous avons pris conscience du gigantesque amalgame qui plane entre l’élevage traditionnel et l’élevage industriel mais également de la place de la mort dans le travail avec les animaux.
L’étude du concept de « Sale Boulot » définit par E.C. Hugues en 1962 dans un article intitulé Good People and Dirty Work, nous a part ailleurs amené à nous intéresser à la problématique des abattoirs.
Vivre avec les animaux, une utopie pour le XXIème Siècle (Jocelyne Porcher) a donc été le premier ouvrage que nous avons découvert et qui nous a permis de redéfinir ce qu’est l’élevage, quelle est la différence entre « élevage » et « productions animales ». Jocelyne nous explique, à travers ce magnifique livre, pourquoi sauver l’élevage en évitant son assujettissement au système d’exploitation et de mise à mort industrielles pourrait être une des plus belles utopies du XXIème siècle.
Le Livre blanc pour une mort digne des animaux toujours de Jocelyne Porcher, co-écrit avec Elisabeth de Fontenay, Eco-éthologue et chargée de recherche à l’INRA, reprend les témoignages de nombreux éleveurs qui doivent faire face à la mort des animaux dont ils ont la charge. Avec l’industrialisation de l’élevage, l’abattage des animaux est devenu une opération invisible. Invisible pour le consommateur mais aussi, en grande partie, pour les éleveurs. Parce que ce qu’ils entrevoient de l’abattoir les heurte profondément, de nombreux éleveurs revendiquent un droit de regard et un droit d’agir, notamment les éleveurs qui défendent une haute idée de leur métier, de leurs relations aux animaux et de leurs responsabilités. Contrairement au discours dominant qui condamne l’élevage, promeut une alimentation biotech et un détachement envers les animaux, ces éleveurs veulent pouvoir assumer la mort de leurs bêtes.
Eleveurs et animaux, réinventer le lien toujours de Jocelyne Porcher, nous a permis de découvrir qu’en moins de cinquante ans, l’élevage en France a été transformé en un ensemble d’activités de « productions animales » identiques dans leurs objectifs et dans l’essentiel de leurs moyens à d’autres productions industrielles. Cette évolution a conduit, grâce à l’appui des scientifiques, à réduire l’élevage à sa seule rationalité économique, et à convertir les éleveurs en producteurs de biens d’origine animale. Si la réussite quantitative de cette transformation est indéniable, son échec est par ailleurs patent. En occultant les rationalités relationnelles de l’élevage qui fondent et justifient notre lien aux animaux, les « productions animales » ont anéanti le sens même de cette relation et construit un rapport aux animaux d’élevage basé sur une exploitation sans merci et sur le déni du lien. Contre la souffrance, les éleveurs témoignent de leur attachement à leurs animaux et de la place de l’affectivité et de la communication dans leur travail. Contre un monde désincarné et désenchanté, dans lequel « on produit des cochons comme on produit des chaussures », c’est à dire ici ou ailleurs, et contre une société dans laquelle ni les éleveurs ni leurs animaux n’auront bientôt plus aucune place, il nous appartient collectivement d’apprendre à travailler avec les animaux d’élevage autrement, de réinventer le lien.
Pour continuer avec l’abattage des animaux, nous avons découvert les écrits de Sébastien Mouret et avons donc approfondi, grâce à la lecture de « Élever et tuer les animaux« , la question de la mort que nous donnons aux animaux d’élevage. Contre ces mouvements de rationalisation morale du comportement des hommes à l’égard des animaux d’élevage et contre les systèmes industriels qui se réduisent à la production et à la sélection, par la destruction des plus faibles, des bêtes à forte valeur marchande, les éleveurs et les salariés nous invitent à penser autrement la question de la mort que nous leur donnons pour nous nourrir, et donc pour vivre. Il s’agit pour nous, comme pour eux, de renouer avec la mort et non d’en finir avec elle, par l’établissement d’un vivre ensemble au travail fondé sur l’amour avec la mort, le bien avec le mal, et non sur leur discrimination.
Nous avons par la suite découvert que la problématique dépassait allègrement les frontières françaises. À travers le documentaire FARMAGEDDON, nous avons pris conscience du pouvoir des lobbies industriels aux USA qui font interdir dans certains états la vente de lait frais et cru à la ferme et ce pour des raisons d’hygiène notamment. Farmageddon: The True Cost of Cheap Meat (Philipe Limbery) est également disponible à la lecture en anglais.
Pour rester aux Etats-Unis, nous avons continué notre exploration par le tout nouveau livre de Jonathan Safran Foer, « Faut-il manger les animaux? ». Etre carnivore est-il moralement légitime? Comment traitons-nous les animaux que nous consommons ? Avant de se lancer dans une vaste enquête, Jonathan Safran Foer convoque souvenirs d’enfance, données statistiques et arguments philosophiques pour interroger nos comportements vis-à-vis des animaux. Il dénonce ainsi l’abomination actuelle des pratiques d’élevage et d’abattage, tout en se penchant sur les derniers vestiges d’une civilisation qui respectait encore l’animal. Choquant, drôle et inattendu.
Enfin nous avons fini notre périple par le Japon par un ouvrage écrit dans les années 70 par Masanobu FUKUOKA, La révolution d’un seul brin de paille. Au cours des quarante dernières années Masanohu Fukuoka a témoigné avec indignation de la dégénérescence de la terre et de la société japonaise. Comme un seul homme, les japonais ont suivi le modèle américain de développement économique et industriel, abandonnant leur riche héritage de travail simple et proche de la terre. Mais M. Fukuoka était déterminé à ne pas abandonner l’agriculture traditionnelle. Il l’affina, au contraire, à tel point que sa méthode d’agriculture sauvage demande moins de travail et cause moins de dégâts à la nature qu’aucune autre méthode tout en maintenant les mêmes rendements à l’hectare que les paysans voisins. Dans cet ouvrage d’une profonde sensibilité et qui fait réfléchir, M. Fukuoka décrit les événements qui l’ont conduit à développer sa méthode d’agriculture sauvage et l’impact qu’elle a eu sur sa terre, lui-même, et les milliers de personnes à qui il l’a enseignée. Il décrit la méthode elle-même et pourquoi il croit qu’elle offre un modèle pratique et stable de société basée sur la simplicité et la permanence. M. Fukuoka fait preuve d’une compréhension profonde des interactions entre l’agriculture et les autres aspects de la culture. Il sent que l’agriculture sauvage a son origine dans la santé spirituelle de l’individu. Il considère que la guérison de la terre et la purification de l’esprit humain sont la même chose et propose une manière de vivre et de cultiver où ce processus puisse se réaliser. Ce livre a pour but de changer les attitudes envers la nature, l’agriculture, la nourriture, la santé physique et spirituelle.
Bonne lecture à toutes et tous!